Théorie Mimétique
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment :
Bon plan achat en duo : 2ème robot cuiseur ...
Voir le deal
600 €

Droite, gauche : diabolisation réciproque

Aller en bas

Droite, gauche : diabolisation réciproque Empty Droite, gauche : diabolisation réciproque

Message  Martin Lun 18 Juil - 20:19

Sous l'influence de la théorie mimétique, de la pensée de René Girard, et pour en avoir le cœur net, je suis allé il y a quelques années, quand j'en avais encore le temps, à l'occasion d'une élection, à un meeting de droite et à un meeting de gauche. J'ai pu observer, constater, vérifier que les procédés sont les mêmes : une partie du temps, des deux côtés, un quart à peu près, est consacrée au dénigrement des idées adverses. Je m'en doutais, bien sûr, mais le voir c'est autre chose, parce qu'au-delà des idées, on s'aperçoit que l'état d'esprit est le même.

Chacun s'inscrit dans un "courant mimétique" qui lui est propre. S'en abstraire, c'est risque de perdre ses amis, ses proches. L'imitation revêt ainsi un caractère obligatoire. Il est possible, dans son propre camp, de se déplacer, un peu plus à gauche, un peu plus à droite, mais changer de camp passe immédiatement pour un désaveu, pour une trahison.

Une fois perçu ce phénomène de diabolisation réciproque, que l'on retrouve dans tout conflit, dans toute guerre, phénomène de bouc émissaire réciproque et rivalité mimétique entre camps, on devient sensible à sa dénonciation qui prend deux formes, actuellement sur l'échiquier politique français : la tendance des extrêmes à penser qu'entre la droite et la gauche c'est "bonnet blanc et blanc bonnet", que c'est la même chose, que c'est pareil ; et la tentative de réconciliation des deux camps en se plaçant au centre, à "l'extrême centre", pourrait-on dire.

Les extrêmes diabolisent eux-mêmes tout ce qui n'est pas eux. Sur le plan de la pensée, ils ne sont guère intéressants. Mais sur le plan de l'influence, ils sont au contraire extrêmement dangereux en période de crise : ils proposent des boucs émissaires, et plus la crise se développe, plus il devient tentant de traquer avec eux les coupables. Seule une résorption réelle de la crise leur ferait perdre tout ou partie de leur pouvoir de séduction. C'est à quoi il faut, je pense, s'employer, plutôt que de les dénoncer et rien d'autre. Sans une alternative crédible, ils ne pourront qu'occuper toujours plus de terrain. Une aggravation de la crise les ferait même triompher.

La tentative de réconciliation, au centre, est plus intéressante, mais elle va contre la tendance naturelles des hommes à s'associer, et on ne s'associe jamais si bien que contre d'autres hommes. De plus, chaque camp développe s'appuie sur des valeurs différentes et développe des idées distinctes même si les programmes politiques finissent tous par se ressembler en cherchant à satisfaire tout le monde. Je ne crois pas à l'identité parfaite de la droite et de la gauche. Les mécanismes y sont les mêmes, mais le débat démocratique est normal : face à un même problème, des solutions divergentes peuvent être proposées sans que cela me semble scandaleux. Le scandale est plutôt dans la systématicité des parti-pris, dans l'électoralisme, quand on trahit ce qu'on pense pour pouvoir être élu ou pour plaire à ses proches.

Le retrait de la vie politique est tentant, lui aussi. "Aux gibelins j'étais guelfe, aux guelfes gibelin", dit Montaigne, c'est rebutant à la longue et la réaction de Shakespeare face aux rapport de "doubles" me parle donc aussi : "A plague on both houses", "la peste soit sur les deux camps". Si la peste, c'est le conflit, on n'a pas besoin de l'invoquer, d'ailleurs, il y est, donc elle y est, et ne s'éteint jamais !

Cependant, comme beaucoup, je cherche à peser les problèmes, à envisager des solutions. Cette expérience de meetings opposés m'a surtout permis de prendre du recul. Les hommes et les femmes, leur sensibilité et leur intelligence, leur comportement, me paraissent plus importants que le parti qu'ils ont choisi. J'aspire aussi à une réconciliation, vu les menaces qui pèsent sur nous tous, mais ne vois pas bien quelle forme elle pourrait prendre. Je préfère donc m'en tenir aux idées : problèmes et solutions. La démocratie ferait un grand pas, il me semble, si les députés pouvaient voter à bulletin secret en leur âme et conscience, mais il me paraît légitime aussi que ceux qui ont voté pour eux veuillent savoir pour quelles lois ils votent. Je ne suis pas homme politique, je n'ai pas de conseil à donner, mais voter selon ses propres convictions me paraît en tout cas fondamental pour les problèmes soient réellement résolus.

Si l'on veut étudier la vie politique, force est de constater que les phénomènes de rivalité, de bouc émissaire, de diabolisation, y jouent un très grand rôle ; un trop grand rôle, encore aujourd'hui, malheureusement. Ca ne doit pas empêcher de s'engager mais rendre vigilant : moins mon propre camp se comportera mal, plus le camp adverse, mimétiquement, se comportera bien. C'est en tout cas ce que l'on peut raisonnablement espérer à la lumière de la théorie mimétique : l'escalade de la violence est mimétique, l'apaisement et le respect mutuel peuvent donc l'être aussi.

Martin
Admin

Messages : 129
Date d'inscription : 17/06/2011

https://theoriemimetique.forumgratuit.org/

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut


 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum