Théorie Mimétique
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Prévention de la récidive et réparation

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Prévention de la récidive et réparation Empty Prévention de la récidive et réparation

Message  Martin Jeu 21 Juil - 0:26

Mes réflexions sur ces sujets seront forcément maladroite parce qu'elles prolongent ma compréhension de la théorie mimétique mais n'en relèvent pas directement. Comment éloigner du fonctionnement de la justice le mécanisme du bouc émissaire qui sous-tend encore partiellement certains de ses rituels ?

Toute "sanction" est une violence mesurée collectivement exercée, donc sacrificielle dans sa structure. La prison est une forme nécessaire d'exclusion : elle prévient la récidive et la vengeance possible des proches de la victime. Elle protège la société du coupable mais aussi le coupable de la société. Concrètement, la prison, d'un point de vue mimétique cette fois, est une aberration : elle met les coupables en contact étroit, ils peuvent donc devenir des modèles les uns pour les autres, et ceci accroît bien sûr la tentation de la récidive au lieu de la diminuer, bien qu'elle soit également dissuasive. La prison est pour certains, on le sait, une école du crime. Les conditions de détention sont telles aujourd'hui encore en France qu'elles redoublent la "violence" mesurée de la sanction : des détenus se suicident en prison, d'autres sont violentés par d'autres détenus, et elle accroît ainsi globalement le ressentiment des détenus envers la société. La prison, de plus, ne répare rien. Certains délits occasionnent des préjudices réparables mais l'emprisonnement empêche toute réparation. D'où le légitime développement actuel de peines alternatives, quand c'est possible.

Réfléchir sur les rapports de la violence et du droit, réfléchir à l'idée d'éloigner la sanction ou de la remplacer par autre chose m'a conduit à envisager un cas théorique imaginaire, irréel, que je trouve cependant intéressant, éclairant : imaginons un coupable dont on serait absolument certain, mais sans l'ombre de l'ombre du moindre doute, qu'il ne récidivera pas, et une société pacifiée ou la tentation de la vengeance privée n'existe plus non plus, le seul impératif qui demeurerait serait celui d'une éventuelle réparation de la victime ou de ses proches. Le coupable serait moralement, donc juridiquement, tenu de tenter de réparer le préjudice causé. Certaines peines, comme les travaux d'intérêt général, vont dans ce sens. Un crime est bien entendu irréparable, mais le coupable pourrait se sentir tenu, alors, d'éventuellement sauver une vie, de sauver des vies.

C'est un cas d'école, bien sûr, mais sans récidive ni sanction, demeure toutefois l'impératif d'une réparation. Cet impératif est-il pris en compte dans les sanctions actuelles ? L'emprisonnement, en tout cas, ne comporte rien de tel. La prison est tellement dure que l'on considère que la souffrance infligée au coupable, c'est-à-dire la privation de liberté et les violences subies en prison, équivalent au préjudice infligé, mais c'est un raisonnement sacrificiel, qui ne sort pas d'une logique de la rétribution, souffrance pour souffrance, donc d'une logique mimétique de vengeance. Si l'on écarte cette logique, l'exigence, positive, de réparation remplace l'exigence, négative, de sanction. La réparation, proportionnée au préjudice, obéit aussi à une logique mimétique, mais c'est une logique mimétique positive, où il s'agit de tenter de compenser par le bien le mal que l'on a fait, et non de compenser le mal que l'on a fait par le mal que l'on subit.

Je suis parti d'un cas théorique idéal : absence de récidive garantie et de vengeance sociale, ce qui m'a permis d'envisager ce qui resterait à faire à un coupable pour que justice soit faite : réparer ses torts, dans la mesure du possible.

Rien ne garantit cependant l'absence de récidive ni l'absence de vengeance sociale. Une peine de prison, une exclusion sociale, suffisamment longue, permet en règle générale de faire retomber la tentation de la vengeance par les proches de la victime. Reste la récidive. La prison est-elle un bon instrument pour prévenir la récidive ? Nous avons vu que non.

Une justice non sacrificielle devrait donc, il me semble, avoir pour double impératif 1) la prévention de la récidive et 2) la réparation.

Ce sont ces deux impératifs, à mon avis, qui devraient décider de tout et conduire à repenser la nature des peines infligées aux coupables. Tout prisonnier, exclu pour le protéger lui et pour protéger la société de sa violence potentielle, devrait être traité humainement, de façon à ce que son niveau de violence intérieure si l'on peut dire, diminue. Soins, socialisation avec des intervenants extérieurs et dans des structures les plus petites possibles, pour éviter la contagion mimétique de la violence au contact exclusif des autres détenus, préparation de sa réinsertion, études, tout devrait être mis en œuvre pour rendre la récidive le plus improbable possible. La gravité de certains crimes rend cependant légitime des précautions accrues, donc une détention prolongée. Une probabilité même faible d'un danger important, en effet, doit conduire à un niveau important, et non pas faible, de précaution. Plus la prison est humaine, moins le prolongement de la détention, par précaution, est douloureux. Enfin, l'impératif de réparation devrait conduire à rendre obligatoire le travail en prison, et le travail au profit de la victime ou de ses proches. Cela faciliterait encore une future réinsertion.

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Le mécanisme du bouc émissaire est seulement résiduel dans la sanction, dont le caractère "sacrificiel" n'est pas très prononcé. Il s'exerce beaucoup plus pleinement en revanche dans l'erreur judiciaire. J'en reparle dès que possible dans un nouveau sujet. J'y insiste, cependant, je ne suis pas spécialiste de ces questions. Je maîtrise mieux d'autres sujets. J'espère recueillir ici d'autres avis et enrichir ma propre réflexion. Ce sont des problèmes très graves que l'on ne résout pas, je le sais bien, à coups de bonnes intentions. Dans le milieu éducatif où j'évolue, on rencontre les mêmes problèmes, mais atténués bien sûr. Je n'ai rien contre la sanction dans ce domaine mais plus elle est réparatrice et de nature à prévenir la récidive, mieux c'est.

Martin
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