La chasse aux sorcières

La chasse aux sorcières n'a pas eu lieu au Moyen-Age, comme on le croit communément, comme je le croyais moi-même, mais à la Renaissance. Elle n'impliquait pas, globalement, les autorités religieuses mais les autorités civiles. Elle ne concernait pas que les femmes mais aussi, 1 fois sur 4 environ, les hommes. Commencée en Suisse, elle s'est étendue à l'Europe entière et ne visait pas principalement des guérisseuses, par exemple, mais littéralement n'importe qui car on faisait dénoncer, sous la torture, d'autres "sorcières" aux accusées qui désignaient d'autres personnes tout aussi innocentes qu'elles l'étaient elles-mêmes.

Jacob Rogozinski a enquêté sur la chasse aux sorcières dans son livre Ils m'ont haï sans raison, de la chasse aux sorcières à la Terreur. Voici un article qui discute ses thèses et une vidéo où il les expose lui-même :

La sorcière n'existe que dans l'imaginaire des persécuteurs et dans des aveux extorqués sous la torture. La sorcière est un personnage mythique né du phénomène de bouc émissaire. La diabolisation de l'autre a produit la sorcière tout comme, d'après René Girard, la diabolisation est l'un des versants du processus qui a créé les dieux archaïques. Les dieux archaïques ont des pouvoirs bénéfiques tout autant que maléfiques. Ils sont nés, comme la sorcière, dans des phénomènes de persécution à ceci près que les communautés sont reconnaissantes envers leurs victimes de la fin de la crise qui suit leur mise à mort. Ces victimes se voient donc attribuer également des pouvoirs bénéfiques alors que les sorcières sont uniquement considérées comme dotées de pouvoirs maléfiques. Les boucs émissaires devenus des dieux archaïques sont, eux, diabolisés (perçus comme redoutables) puis vénérés (car on leur attribue la fin de la crise). Les dieux archaïques sont comme les sorcières des personnages mythiques nés du phénomène de persécution. A la base, ce sont des êtres humains, diabolisés puis vénérés (les sorcières, elles, ne sont pas vénérées). Étudier la chasse aux sorcières permet de mieux comprendre la genèse des dieux archaïques d'après René Girard.