Tous nos désirs, toutes nos rivalités, sont-ils "mimétiques" ?

Tous nos désirs sont-ils mimétiques ?

René Girard observait, dans Mensonge romantique et Vérité romanesque, je crois, à propos des personnages de Stendhal, que le désir mimétique nous entraîne vers les femmes qui ne sont pas faites pour nous, qui ne nous correspondent pas. Cela laisse entendre qu'il y a des femmes qui nous correspondent, que le désir "mimétique" balaye un désir qui ne le serait pas, qu'il peut y avoir des "affinités" réelles entre deux êtres, sur la base de caractères, de tempéraments réellement compatibles. Ces "affinités" cependant, déterminent vraisemblablement l'amour, plutôt que le désir. Mais le désir amoureux a une base biologique évidente, hormonale, autant que neuronale. Le désir amoureux pour une personne qui nous "correspond" vraiment, échappe donc, je pense, très largement au désir mimétique, même si les mécanismes mimétiques peuvent bien sûr perturber même ce type de relation.

Toutes nos rivalités sont-elles mimétiques ?

René Girard fait observer dans Les Origines de la Culture, si je me souviens bien, que les conflits d'intérêt peuvent dégénérer en conflits mimétiques. Le père Jean-Marie Petitclerc évoque le passage fréquent des conflits d'objets aux conflits de personnes. Les conflits d'intérêt ne sont pas prioritairement mimétiques, il est seulement très fréquent qu'ils le deviennent. Combattre des comportements irresponsables ou violents n'est pas du même ordre, à la base, que les rivalités envisagées le plus souvent par la théorie mimétique. Combattre une dictature, par exemple, peut certes dégénérer en guerre civile, en rapport de "doubles", mais ce n'est pas forcément à la base un conflit déterminé par la pure imitation, par le pur désir trop partagé d'un même pouvoir impartageable, par la pure jalousie. Cela pose toute la question des "moyens" que nous employons pour combattre, dans nos conflits au départ les plus compréhensibles et légitimes.

-------

La TM met l'accent sur nos désirs et nos rivalités les plus arbitraires, qui sont souvent les plus violents, ainsi que sur les dérives mimétiques possibles, voire probables, de nos attachements les plus légitimes ou de nos conflits les plus désintéressés. Mais on peut isoler, à partir de la TM, des types de désirs ou de conflits qui ne relèvent que secondairement des effets pervers de l'imitation livrée à elles-même, qui n'en relèvent que dès lors qu'ils se dégradent, qu'ils dégénèrent.

Qu'en pensez-vous ? Avez-vous d'autres idées, d'autres exemples ?