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Crise, chômage : une solution bouc émissaire !

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Crise, chômage : une solution bouc émissaire ! Empty Crise, chômage : une solution bouc émissaire !

Message  Martin Lun 18 Juil - 23:11

Pierre Larrouturou, homme politique et économiste, passé un an par ATD-Quart Monde, ce qui a certainement renforcé en lui le "souci des victimes", ce qui a certainement rendu en lui ce souci plus concret et plus insistant, catholique pratiquant, a intitulé l'un de ses livres :

Crise : la solution interdite
Quand on cesse de chercher des boucs émissaires, on cherche enfin de vraies solutions. Quel est le symptôme majeur de la crise économique depuis 1974, date du premier choc pétrolier ? C'est certainement, bien sûr, le chômage, devenu endémique, et la précarité.

Le taux de chômage des jeunes dans les banlieues explique pour beaucoup la montée de la violence à laquelle nous assistons impuissants. La crise de l'école est aussi due dans une large mesure à la pression que le chômage de masse met sur les enseignants et les enfants. Discréditée car elle ne garantit plus un avenir acceptable, elle est en même temps chahutée de l'intérieur et mise en accusation de l'extérieur. Les enseignants réagissent en accablant de devoirs nos chères têtes blondes et leur souffrance s'en accroît d'autant, donc un jour leur révolte. Je ne suis pas spécialiste, donc je passe sur d'autres conséquences de la précarité et du chômage mais je sais par expérience qu'ils sont également destructeurs sur le plan de la famille.

Le chômage et la précarité ne sont pas les seuls problèmes que nous rencontrions, mais ils sont certainement les principaux problèmes que nous ayons, les principaux symptômes de la crise économique actuelle, du marasme économique actuel.

Au niveau des solutions, que nous propose-t-on ? A droite comme à gauche, on attend tout désormais de la "croissance". Un emballement de la consommation serait destructeur sur le plan écologique mais personne n'y prête réellement attention. On envisage une reconversion, une "croissance verte", mais une fois cette reconversion opérée, avec quoi alimentera-t-on la croissance ? Que nous restera-t-il à consommer ? C'est comme tout attendre de la météo : si la croissance est là tout va bien, sinon, tant pis. On propose d'essayer de l'aider un peu, de souffler sur les braises du développement industriel, de la recherche et du progrès technique et... rien d'autre.

A l'heure de la mondialisation galopante, où l'impuissance économique domine, c'est comme ne rien proposer, n'avoir strictement rien à proposer, car c'est ce que l'on a toujours tenté et proposé sans le moindre succès décisif.

Manquons-nous d'intelligence, en France, ou d'imagination ? Face à la crise, nous manquons plutôt... de volonté ! Si nous voulions chercher de vraies solutions, volontaristes et non attentistes (comme le fait de tout miser sur la croissance), nous en trouverions. Mais nous ne cherchons pas, parce que nous ne le voulons pas vraiment, car si nous cherchions vraiment, nous trouverions : l'organisation d'une société n'a rien d'immuable, s'il y a du chômage, cela n'a rien d'une pure fatalité, c'est juste que lutter contre serait contraignant et que nous n'aimons pas les contraintes.

Une solution possible, parmi d'autres, probablement, mais terriblement réaliste puisque de nombreuses entreprises, depuis Jacques Chirac, l'appliquent déjà et fonctionnent avec, serait de réduire le temps de travail, non pas à la façon des 35 heures payées 39, ce qui ne laisse aucun moyen financier pour embaucher, mais à la façon des 32 heures où l'on touche à certains salaires selon le dispositif de la Loi de Robien qui a été testé avec succès autour de 1996 et dans lequel des entreprises françaises comme Danone ou le Crédit Lyonnais fonctionnent encore depuis des années, où l'on ne touche pas aux bas salaires mais où les salaires moyens et supérieurs diminuent légèrement (de l'ordre de 3% si je me souviens bien).

Du fait des 35 heures payées 39, mesure démagogique qui ne permet pas d'embaucher, cette solution pourtant expérimentée avec succès et généralisable est devenue "interdite", taboue, solution bouc émissaire, automatiquement expulsée sitôt qu'on l'envisage, sitôt qu'on en prononce même le nom.

Les 32 heures avec légère baisse de salaire seraient applicables, créeraient un appel d'air, une bouffée d'oxygène, pour les millions de chômeurs et de travailleurs précaires, dont je suis, mais personne n'en veut, tout le monde ricane, c'est bien pourquoi je plaide en sa faveur. Il n'est pas étonnant que les vraies solutions soient trahies par démagogie ou bien victimisées, en démocratie. Accepter une baisse de salaire va contre les égoïsmes de gauche, et réduire le temps de travail contre les intérêts de droite. C'est pourtant un président de droite, Jacques Chirac, qui a testé avec succès la formule, sur la base du volontariat, et Pierre Larrouturou était consultant auprès des entreprises qui y passaient, soit pour se protéger contre des pertes d'emploi, soit au contraire pour embaucher. J'ai habité non loin d'une entreprise qui était entrée dans ce dispositif. Ce n'est pas une lubie d'intellectuel, c'est une possibilité réelle, mais le sens du bien commun s'efface dès qu'on bouscule les dogmes politiques. Le dogme de l'intangibilité du temps de travail et la diabolisation des 35 heures n'existaient pourtant pas en 1996, sous Jacques Chirac, et renoncer à une solution qui fonctionne encore concrètement par raidissement idéologique est objectivement coupable.

Qui aura le courage aujourd'hui cependant de parler contre le vent de l'opinion ? Les 32 heures sont au programme des écologistes mais il est peu probable qu'ils les mettent eux-mêmes en avant. Notre désir de résoudre réellement la crise dans ses symptômes les plus évidents est une farce. Nous voulons et nous ne voulons pas : s'il faut toucher à nos salaires ou à nos dogmes, tout le monde se défile, il ne reste plus personne, ou presque. Nous préférons le statu quo, l'enlisement, et la montée des boucs émissaires : les étrangers hier et aujourd'hui l'Islam, comme si les expulser allait résoudre quelque chose au volet économique de la crise actuelle.

La réduction du temps de travail est une solution possible volontariste, déjà testée, fonctionnant encore, et immédiatement réalisable. Elle n'est certainement pas le dernier mot de tout mais elle profiterait à tous. Je reprendrais pour finir le titre d'un livre du père Raymund Schwager : "Avons-nous besoin d'un bouc émissaire ?" Il ne pensait pas directement à ce genre de problèmes, mais 1) des laissés-pour-compte, comme des chômeurs ou des personnes en situation de précarité, sont des sortes de boucs émissaires, des exclus que personne n'exclut directement, certes, mais que tout le monde, collectivement, exclut indirectement, en refusant de leur faire une place dans le jeu des chaises musicales que constitue aujourd'hui le marché de l'emploi, 2) la tentation existe en France de faire des étrangers les boucs émissaires du chômage endémique et 3) la réduction du temps de travail est une solution devenue bouc émissaire, taboue, par le jeu des égoïsmes jumeaux, de droite et de gauche.


Dernière édition par Vincent le Mar 30 Oct - 16:23, édité 2 fois

Martin
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Crise, chômage : une solution bouc émissaire ! Empty Le blog de Pierre Larrouturou

Message  Martin Lun 2 Jan - 23:05

Je viens de découvrir que Pierre Larrouturou tient un blog :

J'ai vraiment confiance en lui, pour son parcours (pour son passage par ATD Quart Monde, en particulier), comme pour ses analyses, tout comme j'ai confiance en Martin Hirsch, pour des raisons analogues (passage par Emmaüs, création et mise en place du RSA - intelligence et générosité évidentes). Donc je lui fais encore un peu de publicité, histoire que l'imitation ne nous entraîne pas toujours systématiquement dans le sens du pire, dans le sens, en particulier, des bonimenteurs inféodés à l'Argent qui nous mènent droit à la catastrophe économique et au désastre social. Il reste heureusement quelques personnes intelligentes et responsables sur cette terre. Autant signaler leur existence, avec quelques piqûres de rappel si nécessaire !...

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